vendredi 22 avril 2016

lovesexy

"...But I know love is the only way
Till my dying day..."

Pas du tout préparé à ce D day là. 
Mais merci pour toutes ces années mon prince. 


Couverture de l'album Lovesexy, photo Jean-Baptiste Mondino, 1988.

jeudi 21 avril 2016

se perdre (multi mère, bis)

Je continue à lire des histoires à ma mère, le soir, après l'avoir couchée, pour l'endormir ou du moins favoriser la transition entre le jour et la nuit, deux notions indéchiffrables et insensées pour elle maintenant.

J'ai alterné un temps les Contes de la bécasse, de Maupassant et Parlez-moi d'amour, de Raymond Carver, puis, sur l'indication d'un ami j'ai testé Histoires, de Marie-Hélène Lafon. Je pense que ma mère ne comprend rien du tout à ce que je lis, mais cependant je m'évertue à parler lentement et fort, en articulant beaucoup, et à mettre le ton, de façon exagérée, dès que la narration contient des dialogues. Je modifie considérablement les textes au moment même de la lecture, renommant les sujets quand l'auteur les a éludés, remplaçant les ellipses par des éclaircissements et des explications, parfois m'interrompant pour demander : 
- "Tu comprends bien l'histoire ?"
Ce à quoi elle répond invariablement :" oui, oui, c'est très bien".
La vraie histoire, c'est ma présence, moi assis près d'elle, et le ronron de la voix en direction d'elle.

Récemment j'ai acheté l'Angoisse de la première phrase, de Bernard Quiriny, dont j'avais découvert par (un heureux) hasard il y a quelques années les Contes carnivores.
Dans l'Angoisse, certains des textes sont eux-mêmes des suites de mini-nouvelles.
Dont celle-ci.

Les mères.

"Ce sont ma mère", m'avait dit ce compagnon d'internat après m'avoir surpris en train de regarder les dizaines de photographies de femmes que j'avais trouvées dans le tiroir de son chevet. Sa mère, avait-il alors expliqué, n'était jamais pareille à elle-même d'un jour au suivant ; il lui arrivait même de changer plusieurs fois d'apparence physique au cours d'une seule journée. " Elle reste cependant ma mère, avait-il ajouté, et jamais l'une de ces transformations n'a effacé en elle le souvenir d'une punition donnée la veille, alors qu'elle était une autre." J'avais été fasciné par ses propos, partagé entre l'émerveillement et l'incrédulité. Souvent je l'avais interrogé sur cette mère fabuleuse, chuchotant dans la nuit après qu'on nous eut commandé d'éteindre les feux. Il m'avait dit n'avoir jamais été troublé par son inconstance, mais avait tout de même confessé ce cauchemar récurrent : "Longtemps j'ai rêvé qu'elle ne m'aimait plus, et qu'elle décidait de m'abandonner. Il lui aurait alors suffi de lâcher ma main au milieu d'une foule, puis de s'enfuir. Comment aurais-je pu la retrouver, parmi les milliers de femmes qu'elle allait être encore jusqu'à sa mort?"


L'angoisse de la première phrase, de Bernard Quiriny, est publié aux éditions Phébus.

mercredi 20 avril 2016

soleil noir

J'ai passé le week end avec Basquiat. Enfin, quelques heures, le temps d'une histoire qui, on le sait, finit mal : à la fin il meurt, à 27 ans, d'une overdose.

Quelques heures donc, une parenthèse dans les années quatre-vingt rendue possible par le livre La veuve Basquiat, de Jennifer Clement : une suite de chapitres, comme autant de Polaroïd, ou de croquis à plusieurs mains, pochades de l'auteur et souvenirs de son amie Suzanne Mallouk, la dite veuve, juxtaposés.

Suzanne rencontre Jean-Michel au Night Birds, où elle est barmaid. Pendant deux mois, il vient, la regarde mais ne lui parle pas. Ensuite il s'installe chez elle. Elle est loin d'être la seule personne avec qui Jean, comme elle l'appelle, couche. Elle n'est pas la seule a devenir une ex. Mais elle est celle-ci, celle autour de laquelle tournent les éclats kaléidoscopiques de ce récit.

"Jean Michel ne lit jamais. Il feuillette des ouvrages de mythologie, d'histoire
ou d'anatomie, des BD ou des journaux. Il recherche les mots qui l'atteignent
et les met sur la toile. Il écoute ce que dit Suzanne et l'écrit sur ses dessins.
Il écoute la télévision."

La drogue (beaucoup), la peinture, les musées, l'enfance, les os, les noirs, les boxeurs, Andy Warhol, l'argent, la célébrité, la mère, Madonna, les graffeurs, New York, le vaudou... On retrouve tout ce que l'on sait déjà de Basquiat pour l'avoir lu dans différents articles, mais ici en petits fragments de vie qui tiennent dans la main, au détour d'une journée, d'un trip de trop. Une engueulade, une blague, une discussion... sont l'origine de toiles identifiables. Suzanne est Venus, une Venus trop arabe pour sa mère, le mot Venus marqué sur certaines des peintures.

Ces photos ne sont pas issues du livre qui, à part sa couverture, n'est pas illustré.
Elles ont été faites par une autre ex de Basquiat, Paige Powell, qu'il rencontre en 1983.
Leur exposition, à New York, en 2014, suscita certaines critiques :
le peintre aurait-il de son vivant accepté l'exhibition de ces moments d'intimité ?

"Non seulement vous êtes le plus grand artiste que j'aie jamais vu, mais vous avez le plus beau sexe que j'aie jamais vu," déclare René Ricard quand Jean Michel Basquiat lui ouvre la porte, à poil. Lui, il écrit des poèmes. C'est le New York du Mudd Club et du Paradise Garage. On croise des VIP et des gens moins connus, Diego Cortez, Annina Nosei, William Burrough et Keith Haring, aussi Michael Stewart, jeune noir mort de la violence policière.

Le doux Michael Stewart, 25 ans, batttu à mort
le 15 septembre 1983 par sept policiers new-yorkais.

En fait, c'est peu relaté, mais ce bouquin est une réédition d'une publication de 2003 intitulée En compagnie de Basquiat. Il a bénéficié d'une nouvelle traduction, d'un ajout aussi, un post scriptum daté de 2010 plutôt inutile.

Drôles d'années. Andy Warhol meurt en 1987, Jean-Michel Basquiat en 1988, Robert Mapplethorpe en 1989 et Keith Haring en 1990.
Suzanne, elle, après un court passage par la chanson, a pris un autre chemin. Elle est aujourd'hui psychothérapeute.

La veuve Basquiat, de Jennifer Clement, est publié chez Christian Bourgeois.


dimanche 17 avril 2016

cycle et recycle

Et oui, l'éternel recommencement. Mon énième vélo a donc été volé pour la énième fois. Malgré ses deux antivols (j'avais tapé antivils...), et bien que je l'ai déplacé plusieurs fois dans la journée.  Une nuit dehors, dans la rue, une nuit de trop. La faute à l'impossibilité momentanée d'occuper notre local à bicyclettes, réquisitionné pour d'autres fonctions. Bref.

Bien que ne sachant pas où je vais bien pouvoir le ranger maintenant, j'en achète un nouveau samedi après-midi. De toute façon, pour l'instant, je le monte dans l'appartement car, en plus de l'avoir doté de deux antivols - l'un pour le cadre, l'autre pour la roue avant - il faut que je procède à un bricolage : remplacer le système de serrage de la selle par une visserie classique, pour se prémunir du vol de la dite selle. Re-bref.




A cette occasion je retrouve dans ma boîte à bricol(ag)es plusieurs de ces anciens mécanismes de serrage qui m'ont toujours fait penser à des têtes d'oiseau, de ceux qui, les pattes dans l'eau, embrochent les poissons d'un mouvement vif. Mais plus curieux je retrouve de vieilles clés d'antivols, tout à fait inutilisables (non Marina : même pas vendables sur leboncoin.fr) qui elles, paraissent de mini-espadons.
Les uns mangeront-ils les autres? Banc d'essai...



mardi 12 avril 2016

le jugement du Conseil hétérosexuel de Paris

- Et finalement ton fils, il va faire quoi ?
- Il a opté pour un CAP de pédé.
- Ah, c'est bien. Il veut être pédé pour femme ou pour homme ?
- Je ne sais pas.

Grâce au Conseil prud'homal de Paris, pédé n'est pas une insulte dans un salon de coiffure "car il est reconnu que les salons de coiffure emploient régulièrement des personnes homosexuelles". Bien sûr.

- Et toi, ton fils, toujours au séminaire ?
- Oui. Il se destine à être tripoteur, mais qui sait, on peut toujours rêver, il sera peut-être un jour pédophile.