mercredi 8 juillet 2015

Peeping Tom (à la folie, bis)

Un décor fâné : une salle de concert, un peu décatie, avec deux tables dressées devant l'estrade qui lui donnent un air de salle de fête ; un piano, quelques portes (issues de secours), des ouvertures rares sur l'extérieur, en hauteur, très haut. Ici on doit s'égayer dans l'obscurité, comme il se doit. Et demeurer le reste de sa vie. Inutile de changer de lieu ou d'espace : c'est dans les têtes et les corps que ça bouge, dérive, déglingue.

En réalité, "Vader" (père), la dernière chorégraphie de Peeping Tom, se déroule dans une maison de retraite. Il y a des pensionnaires, du personnel, des fauteuils roulants. Mais aussi l'heure de la soupe, assaisonnée d'une pincée d'univers carcéral, d'un zest de dictature, adoucie d'un fumet de romance éternelle, relevée de demandes d'amour qui s'hurlent en demandes d'excuse ou de pardon.
Sorry! Des surtitres traduisent les quelques dialogues en anglais, mais s'entendent aussi d'autres langues que l'on ne comprend pas : de toute façon les vieux parlent d'un monde oublié.


Tout cela prend des formes étranges, qui métissent la danse de Saint-Guy, l'alchimie et le cartoon : les corps sont élastiques, bondissants, acrobates, insaisissables. Le moindre geste (enlever un manteau) s'effiloche en figures caoutchouteuses (une valse, une balançoire, une étreinte, une contrainte), les personnages mutent sous nos yeux (vieillissement, travestissement, bestialité) et tout s'opère en légèreté, en tendresse et en chansons réinventées magnifiquement (Aguas de marços, Feeling, What a difference a day makes). C'est atrocement drôle.

"Né de la poussière, tu redeviendras poussière." Avant cet anéantissement final, la compagnie Peeping Tom (traduction : le voyeur) nous rappelle qu'il y a la vieillesse à traverser. A coups de balai, accessoire ô combien présent et hilarant dans le spectacle.

Le roi Lear est perdu dans la forêt d'Alzheimer. Mais on nous annonce que Vader n'est que le début d'une trilogie, et que les mises en scène sur la mère et les enfants sont à venir. Deux bonnes raisons de vieillir.

"Vader", de Peeping Tom. Jusqu'au 11 juillet au Théâtre de la Ville.

 
Simon Versnel, Hun-Mok Jung, Marie Gyselbrecht, Brandon Lagaert ,
Maria Carolina Vieira, Yi-Chun Liu et  Leo De Beul. Auxquels s'additionnent
des figurants du troisième âge qui viennent saluer aussi.

mardi 7 juillet 2015

à la folie





Je ne sais pas quand j'ai trouvé cette image, ni de quelle page Web je l'ai tirée. Je me souviens cependant que lorsque je l'ai mise de côté, j'étais touché par le mélange d'amusement et de tristesse qu'elle faisait naître en moi : une bonne blague sur fond de nostalgie (le style du dessin, le rappel de l'enfance), ainsi que cette vue (personnages de dos s'éloignant du spectateur, traçant leur route), qui amène l'idée d'un plan cinématographique de fin (The end).
Aujourd'hui ces émotions restent intactes. S'y ajoute une attention plus particulière à la tendresse un peu blasée qui se devine entre les deux amis, qui me fait regarder cette image comme un clin d'oeil au duo que je forme deux fois par semaine avec ma mère et à l'affection que l'on doit aux fous. Avec lesquels ici et maintenant restent le lieu et le temps où l'on se tient le mieux.

Winnie the Pooh et Piglet sont deux des personnages créés par Alan Alexander Milne d'après les peluches de son fils.