Finalement j'ai assisté à cette éclipse.
Réveillé par hasard au cœur de la nuit, troublé par la vive luminosité des étoiles, je suis descendu sur la plage de Figueretas alors que la Lune était déjà au quart masquée de noir. Je pensais trouver sur mon chemin de nombreux spectateurs, dans les rues ou sur les balcons : une île de noctambules, pour le coup, c'était l'occasion, non?
Arrivé sur le sable, dans cette baie que la nuit rend magique, j'étais presque seul. Quatre ou cinq observateurs, pas plus, alors que plus loin sur la promenade, d'un groupe apparemment éméché, une jeune fille hurlait :" Whou! I want to show you my dick!" Une proposition qu'elle refera peut être en 2033, qui sait?
L'astre lunaire est devenu plus doré que rouge, brunissant en son centre, et au moment où on l'espérait de braise, un voile de nuages blancs l'a couvert.
L'astre lunaire est devenu plus doré que rouge, brunissant en son centre, et au moment où on l'espérait de braise, un voile de nuages blancs l'a couvert.
J'ai pensé brièvement que ces nuages allaient sans doute mettre en péril ma journée plage du lendemain mais l'heure n'était pas aux anticipations mais à goûter cet instant là, cette nuit douce et d'or. J'ai gravi la colline en direction de mon hôtel, le nez toujours en l'air. De blanche, la nappe nuageuse est devenue rose, ajoutant encore à la magie de l'événement.
En haut du dernier escalier qui me ramenait "chez moi", j'ai attendu à nouveau. Entre deux hampes d'agave se détachant sur le ciel et ses nuages barbe-à-papa, la Lune a daigné se montrer à nouveau.
Me retournant, j'aperçois alors, à un balcon de l'hôtel, trois jeunes hommes totalement nus, profitant du spectacle céleste. Deux se tiennent à la rambarde dont l'un, courbé, les jambes écartées, se fait sodomiser par le troisième. La nuit est silencieuse, je perçois le bruit des chairs qui se cognent. Pleine Lune et lune pleine, voilà une amusante façon de célébrer le cosmos, avec sans doute plus d'esprit que le triste monsieur On dans son livre du même nom.
Il faut dire : ayant regardé sur Arte Replay le joli documentaire sur Barthes (Le théâtre du langage, signé Chantal Thomas et Thierry Thomas), ayant écouté Les Murray et Daniel Tammet à la maison de la poésie avant de partir, je me demande par quelle malédiction les médias et l'opinion publique (?) ont fait de monsieur On, ce prof de philo, la figure d'un intellectuel français, grenouille enflée qui nous emboeuf le paysage (qu'on excuse ce néologisme animalier).
Éclipse de la pensée, vraiment, à voir rouge.
Sachant que mon iPhone ne me permettrait pas d'immortaliser la Lune rouge, et ayant eu une subite envie de gyoza, j'ai imaginé que ce lustre ferait l'affaire... |