jeudi 10 mars 2016

la honte, l'audace

Ils sont plusieurs ; l'un d'eux assis sur un strapontin, un debout, à coté de lui, s'appuyant aux parois du wagon, les autres en demi cercle serré en face : un petit groupe de potes. 
Celui qui s'appuie est plutôt Pantone 1Y01, les autres entre le Pantone 2Y13 et le Pantone 4R15. 

(Au début, cette référence aux Pantone était une blague, ça m'est venu en pensant à Nadine Morano. Et puis je me suis rendu compte que ce que je croyais une plaisanterie existait bel et bien : un nuancier Skin Tone Pantone des couleurs de peau... Bref.)

Ils parlent de "meuf(s)", je peine à distinguer vraiment ce qu'ils disent car, excitation aidant, ça rigole, ça surenchère. Il est question d'une fille affublée du surnom Mariah Carey, son nom circule entre tous, chaque fois qu'il est prononcé c'est un rire étouffé ou en cascade, j'imagine que ce sont les formes de la chanteuse, plus que son sourire, qui ont crée la métonymie. 
Puis, soudain, cette phrase :
- Oui mais toi tu as trop honte de ta meuf.
Réponse inaudible. Pourtant, tout à coup ça ne ricane plus.
- Tu fais trop attention aux regards du quartier.
J'entends à peine les marmonements de la réponse, mais je distingue le ton de la justification.
- C'est comme quand j'ai commencé à mettre des jeans, reprend l'autre. Whoula, qu'est-ce que j'ai pas entendu dans la cité. 
Je comprends par la suite que c'est mettre des jeans plutôt qu'un survêtement dont il est question. Celui qui parle, que j'entends bien car je suis assis en face de lui (sa parole se glisse jusqu'à moi en passant entre ses potes debout) il porte des chaussures et un blouson rouges, un jean noir. Il poursuit :
- Qu'est-ce que j'ai pas entendu. C'était trop fashion etc. Mais j'ai tenu, et maintenant je fais ce que je veux, je mets du rouge (il montre ses chaussures et, du ton de celui qui s'apprête à faire la révolution, il lance :) même un chapeau si je veux.


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