Elle est complètement folle. Cette phrase me procure toujours une impression étrange, je me la répète volontairement, pour en prendre pleinement conscience : ma mère est complètement folle.
Dans sa folie elle accède à une joie spontanée qui ne cesse de me surprendre : elle d'un caractère auparavant si prompt à ne voir que le verre à moitié vide, elle devient maintenant capable de s'enivrer du verre seulement à demi plein.
Je ne l'ai pas toujours connue comme ça.
Le chant d'un oiseau l'intrigue, puis l'amuse, puis la fait pouffer de rire si le volatile insiste.
"Oh là la, on se demande vraiment où on est, c'est fou! " (Je me plais à croire qu'elle s'imagine subitement dans une jungle et l'image d'un Douanier Rousseau s'impose à moi).
Par beau temps, la couleur du ciel la fascine, comme si un ciel bleu était un extraordinaire et inhabituel phénomène naturel - tel le passage de la comète de Halley -, ou au contraire le fruit d'un patient travail artistique - Fra Angelico, Rothko, Klein ?...
"Oh c'est magnifique ce bleu. Enfin moi j'appelle ça bleu (Elle a peur de se tromper sur le nom de la couleur). Tu n'aurais pas envie d'aller tout là haut (elle pointe le ciel au-dessus de nous) pour voir comment c'est ? C'est beau bleu partout."
Parfois ce qui la fait rire est incompréhensible. Par exemple je lui demande si elle n'a pas froid, et elle me répond :
-"Non, pas du tout. Mais tu me donnerais cinquante heures que je n'en voudrais pas" et cette remarque déclenche son hilarité - il s'agirait d'une bonne blague à partager, et c'est vrai que cela se déroule de cette façon, car à la voir rire de si bon coeur, je souris à mon tour, ce qu'elle décrypte comme une validation complice de son effet comique et ce qui redouble sa joie.
On se retrouve alors tous les deux, hilares, sans même savoir pourquoi. Ou plus exactement juste pour ça : pour être joyeux ensemble, sans rime ni raison. Les imbéciles heureux, ivres du vent de la folie.
Dans sa folie elle accède à une joie spontanée qui ne cesse de me surprendre : elle d'un caractère auparavant si prompt à ne voir que le verre à moitié vide, elle devient maintenant capable de s'enivrer du verre seulement à demi plein.
Je ne l'ai pas toujours connue comme ça.
Le chant d'un oiseau l'intrigue, puis l'amuse, puis la fait pouffer de rire si le volatile insiste.
"Oh là la, on se demande vraiment où on est, c'est fou! " (Je me plais à croire qu'elle s'imagine subitement dans une jungle et l'image d'un Douanier Rousseau s'impose à moi).
Par beau temps, la couleur du ciel la fascine, comme si un ciel bleu était un extraordinaire et inhabituel phénomène naturel - tel le passage de la comète de Halley -, ou au contraire le fruit d'un patient travail artistique - Fra Angelico, Rothko, Klein ?...
"Oh c'est magnifique ce bleu. Enfin moi j'appelle ça bleu (Elle a peur de se tromper sur le nom de la couleur). Tu n'aurais pas envie d'aller tout là haut (elle pointe le ciel au-dessus de nous) pour voir comment c'est ? C'est beau bleu partout."
Parfois ce qui la fait rire est incompréhensible. Par exemple je lui demande si elle n'a pas froid, et elle me répond :
-"Non, pas du tout. Mais tu me donnerais cinquante heures que je n'en voudrais pas" et cette remarque déclenche son hilarité - il s'agirait d'une bonne blague à partager, et c'est vrai que cela se déroule de cette façon, car à la voir rire de si bon coeur, je souris à mon tour, ce qu'elle décrypte comme une validation complice de son effet comique et ce qui redouble sa joie.
On se retrouve alors tous les deux, hilares, sans même savoir pourquoi. Ou plus exactement juste pour ça : pour être joyeux ensemble, sans rime ni raison. Les imbéciles heureux, ivres du vent de la folie.