Elle s'appelle donc Constance Quéniaux, celle dont le sexe est aussi connu que le sourire de la Joconde (je vous épargne les analogies anatomiques).
Le petit livre de Claude Schopp qui lui est consacré est honnêtement sous-titré Vie du modèle. C'est qu'il ne s'agit pas de l'histoire du tableau : on ne saura rien de sa genèse, de sa commande, des heures de pose qu'il a nécessité etc. C'est la tentative d'un portrait de femme, la restitution à tâtons d'une vie d'après de maigres indices : contrats de travail, entrefilets dans la presse où le nom de la jeune femme se trouve cité...
Peu de matériel donc, mais le goût du détail que l'auteur confesse en introduction nourrit une âme de traqueur d'informations hors pair. On apprend même le nom de la sage femme qui a donné naissance à Constance (l'origine de L'Origine...), accouchant le 9 juillet 1832, à Saint-Quentin, une jeune femme de 23 ans. Père inconnu.
La petite deviendra danseuse. Son premier contrat à l'Opéra est signé lorsqu'elle a 14 ans. La voici donc dans l'univers des demoiselles du demi-monde, entretenues. "La pente est glissante qui mène de la danse à la galanterie, d'autant que le discrédit touchant cette dernière s'est amoindri depuis La Dame aux camélias." C'est toute une partie passionnante du livre qui restitue le monde des biches, à côté duquel l'affaire Weinstein a l'air d'une galéjade, et dans lequel Constance Quéniaux est une figure assez singulière (lire le bouquin pour savoir de quelle façon...).
Finalement le mystère du modèle dissipé, reste que le tableau de Courbet n'est pas un portrait de femme, mais bien le portrait d'un corps féminin, volontairement anonyme, que l'on ne saurait réduire à un sexe, puisque sein, ventre, cuisses et amorce du fessier sont clairement présents. C'est ce parti pris qui en fait la modernité, et l'on s'étonne que certains aient pu imaginer, en 2013, cette toile comme étant le fragment d'un tableau plus important (proposant par ailleurs une tête dont la position est anatomiquement incompatible avec celle du buste de L'Origine du monde, mais passons...).
Reste qu'entre la première ligne de ce billet où je citais la Joconde, et ce soir où je l'achève, je suis allé (hasard) au Louvre avec un ami. Par amusement nous sommes passés admirer Mona Lisa, et j'ai pu constater, moi qui déteste voir les toiles de maître fragmentées pour devenir des magnets ou des mugs dans les boutiques des musées, que cette pauvre Mona, elle, est débitée en tous petits morceaux.
Modernité du regard d'un côté, démembrement de l'image de l'autre.
Le petit livre de Claude Schopp qui lui est consacré est honnêtement sous-titré Vie du modèle. C'est qu'il ne s'agit pas de l'histoire du tableau : on ne saura rien de sa genèse, de sa commande, des heures de pose qu'il a nécessité etc. C'est la tentative d'un portrait de femme, la restitution à tâtons d'une vie d'après de maigres indices : contrats de travail, entrefilets dans la presse où le nom de la jeune femme se trouve cité...
Peu de matériel donc, mais le goût du détail que l'auteur confesse en introduction nourrit une âme de traqueur d'informations hors pair. On apprend même le nom de la sage femme qui a donné naissance à Constance (l'origine de L'Origine...), accouchant le 9 juillet 1832, à Saint-Quentin, une jeune femme de 23 ans. Père inconnu.
La petite deviendra danseuse. Son premier contrat à l'Opéra est signé lorsqu'elle a 14 ans. La voici donc dans l'univers des demoiselles du demi-monde, entretenues. "La pente est glissante qui mène de la danse à la galanterie, d'autant que le discrédit touchant cette dernière s'est amoindri depuis La Dame aux camélias." C'est toute une partie passionnante du livre qui restitue le monde des biches, à côté duquel l'affaire Weinstein a l'air d'une galéjade, et dans lequel Constance Quéniaux est une figure assez singulière (lire le bouquin pour savoir de quelle façon...).
Aujoud'hui, au Louvre, les touristes se photographient plus souvent devant La Joconde qu'ils ne la photographient elle-même... |
Finalement le mystère du modèle dissipé, reste que le tableau de Courbet n'est pas un portrait de femme, mais bien le portrait d'un corps féminin, volontairement anonyme, que l'on ne saurait réduire à un sexe, puisque sein, ventre, cuisses et amorce du fessier sont clairement présents. C'est ce parti pris qui en fait la modernité, et l'on s'étonne que certains aient pu imaginer, en 2013, cette toile comme étant le fragment d'un tableau plus important (proposant par ailleurs une tête dont la position est anatomiquement incompatible avec celle du buste de L'Origine du monde, mais passons...).
Reste qu'entre la première ligne de ce billet où je citais la Joconde, et ce soir où je l'achève, je suis allé (hasard) au Louvre avec un ami. Par amusement nous sommes passés admirer Mona Lisa, et j'ai pu constater, moi qui déteste voir les toiles de maître fragmentées pour devenir des magnets ou des mugs dans les boutiques des musées, que cette pauvre Mona, elle, est débitée en tous petits morceaux.
Modernité du regard d'un côté, démembrement de l'image de l'autre.
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