mardi 21 août 2012

ramadan

« J'étais Dieu ; maintenant je suis une femme. » 


J'ai évidemment l'esprit retors mais quand j'ai lu cette phrase, je me suis dit qu'elle était parfaite pour clore les festivités du ramadan qui se sont achevées dimanche 19. Fête que j'honore avec gourmandise grâce au talent de Z., experte en pâtisserie ad hoc. Merci encore.

Cette phrase, si elle m'a fait sourire, porte pourtant en elle son poids de souffrance. Il s'agit des propos de Joan, jeune femme schizophrène suivi à Chestnut Lodge à partir de 1953 par Harold Searles.

« Au long des années il devint peu à peu évident qu'elle était engagée simultanément dans deux tâches fort absorbantes. L'une était sa lutte pour naître [...] et ne plus vivre comme un "élément" (illimité, qui pouvait, selon les cas, être la lumière, l'électricité, l'air ou l'eau) et pour avoir un corps à elle dans lequel habiter. [...] mais d'autre part naître signifiait l'abandon de son omniprésence infinie et de son immortalité. Durant ces années-là, elle consacra une bonne partie de son temps, entre les séances, à tenter de construire, au sens propre, un corps (au moyen de toute sorte de matériaux – bois, toile, fils de coton avec lesquels elle assemblait les parties du corps), à tenter aussi de transformer, comme si elle était Dieu, en formes humaines et vivantes, des feuilles mortes et d'autres choses, qu'elle jetait dans les toilettes, persuadée que "les tuyaux" pouvaient servir à créer magiquement la vie. C'est de toute évidence avec des sentiments mêlés d'accomplissement et de perte qu'elle m'a dit il y a six ans environ, lorsque le travail de naissance fut bien avancé : "J'étais Dieu ; maintenant je suis une femme."»

Extrait de : le Contre-transfert, Harold Searles, éditions Gallimard, coll. connaissance de l'inconscient.

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