Ce soir-là elle détaille à nouveau la photo dont je faisais allusion dans un billet précédent. |
Ce progrès a cependant un effet pervers : je réalise ce soir que je me concentre uniquement sur mon rôle nourricier plutôt que sur ce que je peux échanger avec elle.
Je me dissimule derrière des problèmes de poulet rôti pour supporter de la voir se vider chaque fois un peu plus de son être, de sa raison.
Effet miroir : je me remémore des images de "mauvaises" mères qui, dans les situations les plus tragiques, n'ont pas d'autres mots que "Tu veux manger quoi ?".
Pourtant maman existe bien. Un dîner récent, où elle n'avait cessé de redire toujours les mêmes choses et de commenter les emballages de fromages, voici qu'elle fait allusion à mon père, je ne sais plus pourquoi.
-"Le pire, c'est que dès que tu seras parti, je vais l'engueuler, et m'engueuler aussi!"
Je l'avais déjà entendu dire qu'elle parlait à mon père "dans sa tête", et qu'elle lui reprochait notamment de l'avoir laissée seule.
-"Pourquoi vas-tu t'engueuler toi aussi ?"
-"Oh parce que, être comme ça, si tu crois que je ne me rends pas compte comment je deviens."
Puis, ensuite :
-"C'est affreux de passer ses journées avec quelqu'un qu'on ne peut même plus voir."
Je te lis et porte aussi attention aux libellés choisis. Depuis que je blogue moi-même, je m'aperçois à quel point ces choix ne sont pas anodins. Je te lis et je me dis, ...tiens, il parle de son père justement en ces jours où l'anniversaire de mort du mien ravive (38 ans plus tard) encore des bouts de chagrin. Je porte, à l'heure où je t'écris, une couleur de vernis très proche de celui de M.
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