Es cavalet.
C'est visiblement leur première journée de plage, ils sont blancs comme neige. Croyant participer à une coutume locale, ils ont commandé une cruche de sangria. Venus à bout du litre et demi de breuvage, en plein soleil, ils ont piqué dans le sable, autour de leur serviette, les pailles multicolores ornées d'un perroquet sautillant que contenait le broc de verre. Il sont gais, gris et rose très vif, le souci de la protection solaire ayant dû leur paraître inversement proportionnelle à celui de leur soif. Les voilà volubiles, discutant en néerlandais avec leurs voisins espagnols et croyant être compris d'eux, pire encore, s'imaginant les intéresser.
Leur bonne humeur convainc un troisième drôle qui accepte de se joindre à eux à condition de payer son écot : il apporte des bières fraîches. Ça manquait. Finalement ils discutent, en anglais, et comparent leurs barbes. Voilà encore un sujet de conversation pour lequel je manquerais de motivation comme de vocabulaire.
Sa Trinxa.
C'est une perfection de la nature qui porte un maillot bleu marine, mais le mot maillot ne donne pas la mesure de cet assemblage complexe de bandelettes bleues qui se suivent et se croisent et finissent par endroits par accepter de supporter quelques centimètres carrés supplémentaires de tissu.
Elle est allongée avec une amie sur un de ces lits deux personnes qu'accueillent maintenant fréquemment les plages à la mode, mobilier "so chill" équipé parfois d'un baldaquin de voilages transparents. Son amie, fort belle, ne peut paraître que banale à côté d'elle. D'ailleurs, celle-ci s'agite en parlant, c'est vulgaire, alors que l'autre reste parfaitement immobile, accoudée de son bras gauche, le droit reposant doucement sur la courbe de son corps et la soulignant à cette occasion, parachevant ainsi sa manière de statue. Il est possible aussi que le moindre mouvement dérange cet arrangement savant de rubans qui, vus de ma place, convergent des hanches vers le pubis, et s'élancent des flancs et des épaules à l'assaut d'une poitrine menue.
Il est impératif qu'elle reste à l'ombre. Le moindre hâle imprimerait sur son corps un insolent fantasme de bondage insolé. Elle bouge si peu qu'elle ne parle. Mais que répondrait-elle à une phrase telle que : " Et je lui ai trempé son caleçon avec mon Ice tea, j'étais trop contente !"
non mais ôtes moi un doute: tu ne fais pas toi même le ménage autour de ta serviette??
RépondreSupprimerC'est quoi ce "petit" tas? Parce que le mythe Ibiza est en train d'être sérieusement écorné à la vue de cette deuxième photo.
Les jours de mauvais temps, par je ne sais quels mouvements marins, la plage est très différente : elle est souvent bordée d'algues, et le sable est plein de mini-débris de plastique comme ceux-là. Puis un jour de beau, et c'est comme si tout avait été lavé. Moi je collecte ces minuscules tâches de couleur pour le plaisir : mosaïque éphémère, et geste écolo, minuscule aussi.
SupprimerMa parole, tu as trempé ta plume dans l'encre cyanurée de La Bruyère pour le férocissime texte Es Cavallet ! Et t'es offert un voluptueux détour par la veine baudelérienne pour le second ! Immensité littéraire...
RépondreSupprimerJe me demande ce que tu aurais pensé du troisième paragraphe que je n'ai pas osé publier....
SupprimerIl y a un mauvais rapport texte/image pour l'illustration des pailles perroquet. Et pour le reste, je te rappelle Les Charlots font l'Espagne (1972). SdA
RépondreSupprimerMille fois d'accord!! :)
SupprimerBeach therapy: merci le colibri :))
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