jeudi 13 janvier 2011

dépenser plus et soigner moins

Juste avant que je me fasse opérer, j'avais trouvé dans ma boite mail un message titré "intervention". En lisant l'intitulé, ce qui m'était venu à l'esprit c'était intervention militaire, ou intervention technique sur la voie ferrée, quelque chose de bref, de mécanique, aussi quelque chose de l'ordre de l'intervention publique, du happening. Et j'avais été surpris de découvrir que dans ce mail, un ami évoquait l'opération chirurgicale, moi qui me préparais pour de longues journées d'hospitalisation dont elle n'était qu'un élément parmi d'autres. En fait, j'avais tort.

L'extrémité de mon lit d'hôpital,
avec ce lien attaché au montant qui permet
de se redresser sans peine.
Deux jours après cette intervention donc (qui techniquement s'était bien déroulée), j'étais là sur mon lit, la perfusion dans un bras d'un côté, le drain sortant du thorax de l'autre (on m'avait enlevé l'oxygène la veille) et je commençais à m'inquiéter sérieusement. J'avais des douleurs, pas très vives mais multiples, dans toute la partie droite du torse, face dorsale et face ventrale, comme si j'avais été lardé de coups de couteau. Et mes mouvements en étaient à ce point entravés que je me demandais si j'allais réussir à me laver et à m'habiller seul, à me faire à manger, à faire les courses etc. J'en étais là de mes réflexions quand le téléphone sonna : c'était EMA, ma chère doctoresse (je crois que je ne lui avais même pas dit où j'étais hospitalisé, elle est vraiment incroyable), qui venait prendre de mes nouvelles et était, chaleureuse et prévenante, dans l'anticipation de l'après hôpital. Allais-je être seul chez moi à la sortie ? Mon immeuble avait-il un ascenseur ? Comment trouver une infirmière au moment des fêtes pour me faire les pansements ? Et la kiné respiratoire ? Ne serais-je pas mieux en maison de repos etc.
Je venais juste d'apprendre que mon ami Alain allait sans doute rester la semaine entière à Paris plutôt que juste le week end, ça changeait pas mal la donne, il fallait que je repense à tout cela, on convint avec EMA de se rappeler le lendemain.

Le lendemain, je devais avoir avec le docteur Gé ce dialogue surréaliste.
Gé : j'ai eu votre médecin traitant au téléphone.
Moi, ignorant s'il parle du docteur T ou de EMA, je cite le prénom de EMA.
Gé : je ne connais pas son petit nom.
Moi : EMA ?
Gé : je crois que c'est cela son nom. Elle avait l'air de s'inquiéter.
Moi : elle s'inquiète plutôt pour l'après.
Gé, fièrement : mais je lui ai dis, il n'y a pas d'après (faisant avec le bras le mouvement d'une serpe qui couperait de l'herbe rase).

Ok. C'est juste que le docteur Gé a oublié qu'après, moi j'existais encore. Mais il doit y avoir une gloire à ce que l'intervention soit tout et suffisante.
Je suis sorti de l'hôpital avec juste une ordonnance pour faire enlever le fil du drain la semaine suivante. Comme de bien entendu, une fois ce fil ôté, la plaie demeurait ouverte et suintante. L'infirmière a du revenir plusieurs fois refaire le pansement, ce pour quoi je n'avais pas d'ordonnance et j'ai du déranger encore EMA.
Aujourd'hui j'ai cet épanchement pleural, que le docteur Gé, vu tout à l'heure à l'hôpital, considère comme modéré ("ça arrive fréquemment") et pour lequel il me prescrit de la kiné respiratoire, kiné respiratoire que EMA appelait de ses vœux il y a déjà trois semaines.
On a donc perdu trois semaines et les kilos qui vont avec en ce qui me concerne. A-t-on voulu faire des économies ? C'est raté on vient de dépenser radio pulmonaire et consultation de spécialiste, sans faire l'impasse sur la kiné, et en repoussant encore mon arrêt maladie.

Parfois je me demande : mais pourquoi on écoute pas les médecins qui soignent, comme EMA, plutôt que les interventionnistes qui interviennent ?


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire