Conseillé par mon amie F. (qui s'y connaît en art de mettre l'eau à la bouche, certains le savent), je me suis rendu hier au MK2 seine pour voir Shame, de Steve McQueen.
Occasion de passer en vélo sur le pont Lafayette, tout en béton ("à poutres triangulées en béton armé" dit-on à l'école polytechnique) que l'on doit à Albert Caquot, structure ô combien cinématographique avec celle de son petit frère en métal, à 50 mètres de là, le pont de la rue de l'Aqueduc. On les aperçoit dans Paris vu par... (1965) et dans Clair de terre par exemple, (de Guy Gilles, déjà cité rapidement ici) mais sûrement dans plein d'autres films et j'aimerais une autre vie pour m'amuser à recenser leurs apparitions à l'écran.
C'est difficile de parler d'un film réussi et raté comme Shame, en l'occurence très subtil par moment et globalement premier-degré-ringard, d'autre part objet de critiques outrées elles-mêmes contrastées, excellentes ou désastreuses. Pour donner le pitch rapidement : c'est le portrait d'un homme accro à la baise de façon pathologique ; un moment, une drague plus que fugace avec une collègue de travail et sa sœur qui s'invite dans son mini appartement bouleversent ses habitudes, le regard qu'il a sur lui-même ; c'est la prise de conscience addiction = impossibilité de relation. C'est tout.
C'est vrai que c'est bien filmé : esthétique, cadrage, plans séquence ou montage rapide... c'est beau, efficace et censé. Il y a là dedans les plus belles scènes de baise jamais vues au cinéma (avec celles de Intimacy, de Chéreau, qui sont pourtant comme leur contraire), les plus honnêtes peut-être aussi. Le réalisateur se dit sensible à la présence physique à l'écran et de ce côté là, –charnel, corporel –, le spectateur est comblé.
Pour le reste, on a à faire avec un drôle d'objet. C'est titré Shame, mais la honte n'est jamais évoquée. Ça veut parler de sexualité pathologique, mais là, le portrait est vraiment tracé à trop gros traits. Notre héros consomme des prostituées, est adepte des rencontres furtives avec des inconnues, consomme de la pornographie en magazine, en film chez lui et à son bureau, du sexe interactif sur Internet et il se masturbe plusieurs fois par jour de façon compulsive. C'est trop, il faut choisir, ce n'est plus un addictif, c'est un additif! Et il manque sacrément à l'image la capacité de plaisir ou de jouissance du névrosé basique : là pour le coup c'est trop peu, trop fugace.
Le scénario est effrayant de platitude, je ne vais pas le dévoiler ici mais il est si prévisible que quinze minutes après le début de la projection vous aurez déjà compris où on vous emmène. Et ce n'est pas très grave, c'est comme la baise, on sait souvent comment cela se termine. D'une certaine façon le film est à l'image de cet extrait ci-dessus (mais ce n'est pas une vidéo, juste la chanson, je n'ai pas trouvé d'extrait qui reprenne toute la chanson) : Sissy, la sœur du héros (Brandon) chante dans un bar (devant lui et son boss) un New York New York si ralenti que toute la dimension victorieuse, combattante, en est absente : ne reste que le regard de la provinciale exclue sur la ville et sur ses désirs, et elle sait qu'elle n'y croit plus. C'est un moment assez émouvant où se dit sans se dire tout le passé commun du frère et de la sœur, ce qui les réunit, ce qui les a amochés et ce qui a façonné leur être au monde d'aujourd'hui. Et bien croyez-moi ou non, le réalisateur a choisi de faire pleurer le héros à ce moment. Le marteau pilon qui écrase la libellule.
À part ça j'aime bien Jean-Sébastien Bach et Nicole Beharie qui sont aussi au générique. Et j'aimerais savoir si dans la VO (trop occupé à lire les sous-titres je n'ai pas prêté attention) il y a la même utilisation du mot vintage dans la scène du chapeau de Sissy et dans la scène à l'hôtel avec Marianne (si quelqu'un a noté, suis preneur de l'info).
Occasion de passer en vélo sur le pont Lafayette, tout en béton ("à poutres triangulées en béton armé" dit-on à l'école polytechnique) que l'on doit à Albert Caquot, structure ô combien cinématographique avec celle de son petit frère en métal, à 50 mètres de là, le pont de la rue de l'Aqueduc. On les aperçoit dans Paris vu par... (1965) et dans Clair de terre par exemple, (de Guy Gilles, déjà cité rapidement ici) mais sûrement dans plein d'autres films et j'aimerais une autre vie pour m'amuser à recenser leurs apparitions à l'écran.
C'est difficile de parler d'un film réussi et raté comme Shame, en l'occurence très subtil par moment et globalement premier-degré-ringard, d'autre part objet de critiques outrées elles-mêmes contrastées, excellentes ou désastreuses. Pour donner le pitch rapidement : c'est le portrait d'un homme accro à la baise de façon pathologique ; un moment, une drague plus que fugace avec une collègue de travail et sa sœur qui s'invite dans son mini appartement bouleversent ses habitudes, le regard qu'il a sur lui-même ; c'est la prise de conscience addiction = impossibilité de relation. C'est tout.
C'est vrai que c'est bien filmé : esthétique, cadrage, plans séquence ou montage rapide... c'est beau, efficace et censé. Il y a là dedans les plus belles scènes de baise jamais vues au cinéma (avec celles de Intimacy, de Chéreau, qui sont pourtant comme leur contraire), les plus honnêtes peut-être aussi. Le réalisateur se dit sensible à la présence physique à l'écran et de ce côté là, –charnel, corporel –, le spectateur est comblé.
Pour le reste, on a à faire avec un drôle d'objet. C'est titré Shame, mais la honte n'est jamais évoquée. Ça veut parler de sexualité pathologique, mais là, le portrait est vraiment tracé à trop gros traits. Notre héros consomme des prostituées, est adepte des rencontres furtives avec des inconnues, consomme de la pornographie en magazine, en film chez lui et à son bureau, du sexe interactif sur Internet et il se masturbe plusieurs fois par jour de façon compulsive. C'est trop, il faut choisir, ce n'est plus un addictif, c'est un additif! Et il manque sacrément à l'image la capacité de plaisir ou de jouissance du névrosé basique : là pour le coup c'est trop peu, trop fugace.
Le scénario est effrayant de platitude, je ne vais pas le dévoiler ici mais il est si prévisible que quinze minutes après le début de la projection vous aurez déjà compris où on vous emmène. Et ce n'est pas très grave, c'est comme la baise, on sait souvent comment cela se termine. D'une certaine façon le film est à l'image de cet extrait ci-dessus (mais ce n'est pas une vidéo, juste la chanson, je n'ai pas trouvé d'extrait qui reprenne toute la chanson) : Sissy, la sœur du héros (Brandon) chante dans un bar (devant lui et son boss) un New York New York si ralenti que toute la dimension victorieuse, combattante, en est absente : ne reste que le regard de la provinciale exclue sur la ville et sur ses désirs, et elle sait qu'elle n'y croit plus. C'est un moment assez émouvant où se dit sans se dire tout le passé commun du frère et de la sœur, ce qui les réunit, ce qui les a amochés et ce qui a façonné leur être au monde d'aujourd'hui. Et bien croyez-moi ou non, le réalisateur a choisi de faire pleurer le héros à ce moment. Le marteau pilon qui écrase la libellule.
À part ça j'aime bien Jean-Sébastien Bach et Nicole Beharie qui sont aussi au générique. Et j'aimerais savoir si dans la VO (trop occupé à lire les sous-titres je n'ai pas prêté attention) il y a la même utilisation du mot vintage dans la scène du chapeau de Sissy et dans la scène à l'hôtel avec Marianne (si quelqu'un a noté, suis preneur de l'info).
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire