Deux images que j'ai faites en toute fin d'année dans un restaurant du quartier. Ce n'était pas exactement celui dans lequel je souhaitais aller, mais l'établissement où j'avais prévu de dîner était pris d'assaut et une file d'attente se faisait même dehors... Je n'avais jamais vu cela avant. Ceux qui l'ignorent le comprendront aisément avec ces photos, le quartier de la gare du Nord est un quartier indien.
Cette "little India" s'étend symétriquement au nord et au sud de La Chapelle, remontant la rue Max Dormoy jusque la place Paul Éluard et descendant jusque la gare du Nord, égrènant ses commerces autour de la rue du Faubourg-Saint-Denis.
Sur la photo, en bas à droite, quatre dents révèlent que contrairement à la plupart des consommateurs ici, je mange avec une fourchette n'ayant pas la dextérité nécessaire pour maintenir avec les doigts le riz et les aliments en un bloc conglutinant.
Voulant retrouver sur Google Maps l'adresse exacte du Madras café (donc : photos ci-dessus et en vrai au 180 de la rue du Faubourg-saint-Denis), je me balade dans la rue grâce à la fameuse fonction street view avec laquelle je m'amuse toujours beaucoup (voir billet "american pixel", du 03/11, ou "entre les mailles" du 19/11), et je découvre nombre d'endroits, brasserie franchouillarde ou pizzeria, qui sont devenus, depuis les prises de vue de Google, des restaurants indiens.
C'est encore grâce aux ressources du Net que je peux maintenant éviter les approximations et préciser que plutôt que d'un quartier indien il faut parler d'un quartier tamoul, et qu'à ce titre, l'appellation "little Jaffna" (ville du nord du Sri Lanka") est plus juste que "little India".
Car le gros du mouvement migratoire qui a donné son visage au quartier est constitué de tamouls du Sri Lanka qui, fin 70 début 80, commencent à fuir leur pays où sévit la guerre civile. Ce sont d'abord des hommes seuls, beaucoup souhaitant rejoindre l'Angleterre mais qui, stoppés ici par le durcissement des lois anglaises sur l'immigration, restent dans l'alentour des gares où foisonnent les hôtels peu chers. Dans les années 80 femmes et enfants commencent à rejoindre les premiers arrivés puis, enfin, en 88, les Tamouls bénéficient du statut de réfugiés politiques : "les Sri Lankais constituent donc jusqu’en 1995, une des premières nationalités à se faire reconnaître le statut de réfugié", écrit Anthony Goreau-Ponceaud dans « La diaspora tamoule en France : entre visibilité et politisation », l'article dont je tire toute ma science récente. Cette info m'étonne tellement que je glisse mon nez dans l'historique de l'Ofpra. Où je lis : "Parmi les flux qui se sont développés depuis le début de la décennie [note : c'est un texte historique, il s'agit des années quatre-vingt ici ], il faut souligner la demande des Tamouls du Sri Lanka, révélatrice de l'importance des conflits ethniques dans les problématiques de notre époque en matière de droit d'asile. Son importance numérique, la durée du conflit et le taux d'accord élevé ont fait de la communauté tamoule sri lankaise la première population de réfugiés statutaires ces dernières années". Ça concorde.
Après les régularisations, les modalités de cette immigration se modifient : les réfugiés font moins appel aux structures d'aides et s'appuyent plus sur la communauté installée, et s'ils transitent toujours par le 10e et le 18e arrondissements, ils s'installent avec des perspectives de long terme et résident le plus souvent en banlieue.
C'est fou ce que la gourmandise nous apprend, non ?
L'article d'Anthony Goreau-Ponceaud, La diaspora tamoule en France : entre visibilité et politisation, (Sur le vif 2009, mis en ligne le 13 mai 2009) est tiré de la revue en ligne EchoGéo.
Pour télécharger la brochure historique de l'Ofpra, c'est là.
Au Madras Café. |
Cette "little India" s'étend symétriquement au nord et au sud de La Chapelle, remontant la rue Max Dormoy jusque la place Paul Éluard et descendant jusque la gare du Nord, égrènant ses commerces autour de la rue du Faubourg-Saint-Denis.
Sur la photo, en bas à droite, quatre dents révèlent que contrairement à la plupart des consommateurs ici, je mange avec une fourchette n'ayant pas la dextérité nécessaire pour maintenir avec les doigts le riz et les aliments en un bloc conglutinant.
Voulant retrouver sur Google Maps l'adresse exacte du Madras café (donc : photos ci-dessus et en vrai au 180 de la rue du Faubourg-saint-Denis), je me balade dans la rue grâce à la fameuse fonction street view avec laquelle je m'amuse toujours beaucoup (voir billet "american pixel", du 03/11, ou "entre les mailles" du 19/11), et je découvre nombre d'endroits, brasserie franchouillarde ou pizzeria, qui sont devenus, depuis les prises de vue de Google, des restaurants indiens.
C'est encore grâce aux ressources du Net que je peux maintenant éviter les approximations et préciser que plutôt que d'un quartier indien il faut parler d'un quartier tamoul, et qu'à ce titre, l'appellation "little Jaffna" (ville du nord du Sri Lanka") est plus juste que "little India".
Car le gros du mouvement migratoire qui a donné son visage au quartier est constitué de tamouls du Sri Lanka qui, fin 70 début 80, commencent à fuir leur pays où sévit la guerre civile. Ce sont d'abord des hommes seuls, beaucoup souhaitant rejoindre l'Angleterre mais qui, stoppés ici par le durcissement des lois anglaises sur l'immigration, restent dans l'alentour des gares où foisonnent les hôtels peu chers. Dans les années 80 femmes et enfants commencent à rejoindre les premiers arrivés puis, enfin, en 88, les Tamouls bénéficient du statut de réfugiés politiques : "les Sri Lankais constituent donc jusqu’en 1995, une des premières nationalités à se faire reconnaître le statut de réfugié", écrit Anthony Goreau-Ponceaud dans « La diaspora tamoule en France : entre visibilité et politisation », l'article dont je tire toute ma science récente. Cette info m'étonne tellement que je glisse mon nez dans l'historique de l'Ofpra. Où je lis : "Parmi les flux qui se sont développés depuis le début de la décennie [note : c'est un texte historique, il s'agit des années quatre-vingt ici ], il faut souligner la demande des Tamouls du Sri Lanka, révélatrice de l'importance des conflits ethniques dans les problématiques de notre époque en matière de droit d'asile. Son importance numérique, la durée du conflit et le taux d'accord élevé ont fait de la communauté tamoule sri lankaise la première population de réfugiés statutaires ces dernières années". Ça concorde.
Après les régularisations, les modalités de cette immigration se modifient : les réfugiés font moins appel aux structures d'aides et s'appuyent plus sur la communauté installée, et s'ils transitent toujours par le 10e et le 18e arrondissements, ils s'installent avec des perspectives de long terme et résident le plus souvent en banlieue.
C'est fou ce que la gourmandise nous apprend, non ?
L'article d'Anthony Goreau-Ponceaud, La diaspora tamoule en France : entre visibilité et politisation, (Sur le vif 2009, mis en ligne le 13 mai 2009) est tiré de la revue en ligne EchoGéo.
Pour télécharger la brochure historique de l'Ofpra, c'est là.
Gourmande et curieuse j'ai vraiment envie que ce blog continue de me mettre l'eau à la bouche.
RépondreSupprimerDommage qu'à cette heure il n'y ait pas un nouveau post à se mettre sous la dent!
Yolande