mardi 6 février 2018

bain de soleil

Rentré il y a peu en France, j'ai trouvé la transition difficile, mais ma première semaine de travail (très) intense a été suivie d'un plaisir rare : grâce à ma bonne fée M., j'étais averti depuis longtemps de la programmation du film The Swimmer au Forum des images, aux Halles, à Paris.

Il a fallu de la patience pour mériter ce joyau, car le projectionniste faisant défaut, la séance a commencé avec trois quarts d'heure de retard. J'ai profité de cette attente pour relire ce que j'avais dit de ce film sur ce blog, ce que je ne fais que rarement (ici et là pour la bande annonce). C'est toujours amusant et troublant pour moi de retrouver ces articles d'un temps où j'écrivais beaucoup et régulièrement. Cependant je ne suis pas arrivé à retrouver d'où m'était venu mon intérêt subit pour John Cheever.

Le film, dont il vaut mieux ne pas dévoiler le scénario pour garantir aux futurs spectateurs le plaisir de la découverte, voire de la surprise, peut tout de même être décrit pour ce qu'il est : une étrangeté. 

Par sa forme déjà. J'ai déjà décrit ici le Technicolor d'époque qui, aujourd'hui, prend des allures de manifeste esthétique. L'autre bizarrerie formelle vient du propos lui-même, qui suppose un héros (Burt Lancaster), filmé du début à la fin en maillot de bain, alors qu'il partage pratiquement toutes ses scènes avec des partenaires habillés. 
En effet Neddy, le personnage principal, décide de rentrer chez lui à la nage, c'est dire en passant par toutes les piscines qui se trouveront sur son chemin jusqu'à sa maison. L'idée est déjà saugrenue. Ce drôle de chemin faisant, moitié courant dans les bois pieds nus, moitié se jetant dans des bassins privés et même dans la piscine municipale, Ned Merrill côtoie des Américains aisés, sirotant des drinks et faisant la fête dans leur jardin, qui, eux, affichent un look sixties plutôt apprêté. Nous sommes dans la banlieue huppée du Connecticut et la piscine, avec ses accessoires, est un marqueur du standing de ses propriétaires.




Il est difficile de ne pas penser à l'imagerie de Tarzan à voir cet acteur en culotte taille haute sans arrêt à l'écran, et les scènes les plus inattendues s'enchaînent, que ce soit Burt Lancaster faisant la course avec un cheval ou mimant le saut de haie en compagnie d'une jeune fille, ancienne baby-sitter éperdue. Les situations sociales autour des piscines sont également pleines de bizarrerie, le héros montre des réactions ou des attitudes tout à fait imprévues, et le spectateur doit continuer d'accepter avec toujours plus d'incrédulité l'irruption de cet homme à demi-nu, sourire Colgate aux lèvres, dans les lieux les plus divers.
Bref, c'est vraiment un petit moment de cinéma très jouissif. 

Après-coup j'ai appris que c'est Sidney Pollack qui avait terminé le tournage du film, généralement crédité au réalisateur ayant commencé le job, Frank Perry. L'extrait ci-dessus est un caméo de John Cheever, c'est-à-dire la figuration de l'écrivain dans le film : c'est bien sûr l'homme de droite.

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