mercredi 6 novembre 2019

dernière journée avec V.

Quand mon cousin vient me chercher en voiture à La Souterraine, je partage avec lui ma découverte de la Lanterne des morts. Lui non plus n'en a jamais entendu parler, bien que cette tradition semble plutôt de la région, comme je l'apprendrai plus tard.

Je passe sous silence l'art topiaire remarqué dans le cimetière, mais lui livre cette autre observation : la présence, sur les tombes, pour indiquer les informations relatives au défunt, de disques de céramique blanche, qui produisent un effet graphique singulier. Il a déjà noté la même particularité dans sa ville, à quelques dizaines de kilomètres, et il l'associe, avec justesse je pense, à la production locale de porcelaine (Limoges n'est pas loin, on renoue avec Ceux qui m'aiment prendront le train...)



Et il me révèle une autre coutume d'ici : déposer sur la tombe le bol de petit-déjeuner du mort. Je n'ai jamais vu cela non plus, et en rentrant je chercherai également des infos à ce sujet. On trouve en effet des bols ou des coupelles, notamment dans le Nord de la Creuse.

Après un déjeuner qui réunit encore d'autres cousins et cousines, on rejoint le village de Vallières. J'imaginais que nous arriverions trop tard pour la fermeture du cercueil, mais il est encore temps de jeter un dernier regard sur V.

Elle est vêtue de bleu vert, les mains jointes, la peau jaunie, la tête un peu rentrée dans le cou et son nez paraît plus pointu que d'habitude. Malgré son volume important, elle me fait penser à une souris de Beatrix Potter, Madame Trotte-menu. Je pense que l'image l'amuserait. J'hésite à l'embrasser, mais finalement je ne le fais pas, la présence de l'employé des pompes funèbres me dérange.

Il y a ensuite une cérémonie dans la petite église du village, qui peine à contenir famille et amis de longue date. Le fils de V. a composé pour l'occasion une chanson, qu'il interprète en s'accompagnant à la guitare, ce qui anime joyeusement les fades bondieuseries de rigueur.

C'est quand nous sortons de cette messe que la pluie s'abat. Elle ne va plus cesser, jusqu'à transformer le trajet au cimetière et la descente du cercueil dans la tombe en scènes de cinéma. Car le vent s'y met, retournant les parapluies, jetant la pluie de biais sous ceux qui restaient dépliés. Tout le monde n'est pas équipé, on se regroupe, pressés en grappe sous un même pébroc, même les plus abrités sont trempés. On ne s'entend plus. C'est amusant car chacun y voit comme un ultime pied de nez, un clin d'oeil à V. qui aimait tellement les averses et aimait tant marcher sous la pluie.

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