jeudi 18 avril 2019

impermanence

Je suis souvent décalé, dans l'après-coup (j'ai d'ailleurs un sérieux esprit d'escalier), et je n'ai donc pas suivi en direct l'incendie super star de lundi soir.

Je travaillais, et la personne que je recevais à ce moment-là venait juste d'apercevoir au loin, avant d'arriver chez moi, l'impressionnant panache de fumée. C'est donc elle qui m'a annoncé "Il y a un incendie à Notre-Dame". Je dois avouer que je ne me suis pas inquiété. J'ai pensé : nous sommes dans un monde moderne, tous les matériaux doivent être traités et retraités contre le feu et les charpentes doivent aussi abriter, bien dissimulés, quantité de dispositifs anti-incendie. Le truc va être étouffé en cinq sec.



C'est plus tard sur mon mobile que j'ai découvert les premières images qu'un ami photographiait sur son poste de télévision pour me les envoyer. La lumière violette de l'écran capturé par son téléphone ajoutait encore à l'irréel de la chose. Quand il m'a annoncé "la flèche est tombée", j'ai enfin compris.

Evidemment l'ampleur du sinistre. Mais aussi l'évidence de la vulnérabilité de ces constructions humaines, la limite de la technique face aux éléments naturels, la petitesse des hommes, la compression du temps (quelques heures qui font s'envoler en fumée quelques siècles)..., bref tout ce qui nous est tombé dessus comme des poutres enflammées et qui nourrit depuis nombre d'articles ici ou là.

Ce soir, dans une gare RER, j'ai regretté de ne pas avoir le temps de saisir la scène suivante (j'étais sur un escalier mécanique qui m'en éloignait) : une femme se tenait devant une affiche reproduisant la couverture d'un hebdo, Le Point je crois, figurant Notre-Dame en feu. Je la voyais de dos, au milieu des flammes puisque l'affiche était plus grande qu'elle. Mais surtout j'étais touché de l'attention qu'elle avait à l'image, je voyais qu'elle la détaillait, elle scrutait telle ou telle partie de l'édifice que sûrement sur des photos plus petites elle n'avait pas pu voir avec autant de précision. Une attention douloureuse, c'est ce qui m'a semblé, comme quelqu'un qui regarderait un patient couvert de bandages.

Moi-même auparavant j'avais regardé les pages du Monde réalisées avec des photos où un système de glissière permet sur la même image de comparer avant et après.
J'ai eu un petit pincement au coeur car il me semble que le journal avait fait la même chose pour des villes ou des monuments syriens...

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