jeudi 26 avril 2012

du sel

S'il m'est arrivé d'accumuler des objets, des images ou des livres, je suis en revanche un bien mauvais collecteur de souvenirs touristiques. Parfois, une canette de boisson locale ou un sac de plastique au motif amusant m'intéressera plus que les productions artisanales locales. Je ne ramène en général rien du tout de mes voyages à l'étranger. 
De retour de vacances, à force d'avoir à racheter toujours l'épicerie dans les maisons de location où l'on trouve les placards exempts des produits de base les plus simples, j'ai quelquefois rapporté dans mes valises du sel qui me restait : je l'ai fait en revenant d'Ibiza, île qui possède, avec ses salines, sa production propre. Et j'ai goûté par la suite le plaisir imprévu de cette présence quotidienne –le petit flacon torsadé de sel ibizenco sur ma table parisienne, rappel des jours passés – et celui d'ingérer jour après jour, jusqu'à sa disparition complète, un souvenir destiné à ne plus être.

À gauche la dernière phase de production du sel, sur la plage de Kusamba
(Bali) : l'évaporation terminale se réalise dans des demi troncs de cocotiers
évidés. À droite, trois petits sachets de sel achetés sur place.
 Sur la plage de Kusamba, à l'Est de Bali (mais on le fait également au Nord, à Amed) on récolte le sel par évaporation. Il n'y a pas de grandes salines, comme à Ibiza, l'obtention d'une solution salée se fait sur de petits carrés de sable et la phase terminale du travail s'opère dans des troncs de cocotiers fendus en deux, où les précieux cristaux finissent de s'offrir au soleil. C'est un travail artisanal éreintant qui tend à disparaître et une curiosité qui attirent les touristes de mon acabit. D'ailleurs, sur la petite exploitation où nous nous sommes rendus, nous attendaient de pied ferme deux fillettes espiègles qui tentaient de nous vendre des colliers, trop occupées par leur joie pour s'appliquer vraiment à leur commerce.
-"10000 roupies, 10000 roupies, suppliaient-elles, for school tomorrow!", avant d'éclater de rire devant leur propre outrance.
L'endroit était enchanteur et pour touristique que fut notre halte, le couple de travailleurs qui trimait sur place ne faisait pas de figuration et n'avait pas le loisir de jouer les éco-guides. Seule la femme, dont je voyais à peine le visage dans l'ombre de son chapeau en forme de bernique, abandonna son labeur pour venir me proposer du sel. J'en achetai un peu sans trop négocier, acceptant d'emblée un prix excessif pour ces petits paquets.
Le soir, de retour à l'hôtel, glissant le sel dans l'unique valise cabine avec laquelle je voyageais, je me demandais la tête que feraient les douaniers devant ces petits sacs emplis de produit blanc. En entrant dans le pays mon bagage avait été fouillé de fond en comble, interrogatoire à l'appui, de simples monodoses de gouttes oculaires suscitant la suspicion. Au retour, on passait par Singapour et Bangkok, il fallait que le sel empaqueté, lui aussi, fasse de même.

2 commentaires:

  1. Imaginons que l'on suggère à Sarko et Hollande de plonger dans l'eau de Lourdes tu crois qu'on en finirait avec le "bad dream"?
    Signé: une rêveuse

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  2. SORRY
    ce commentaire est à mettre en lien avec le post "rêveurs"
    Je devais vraiment rêver en l'écrivant pfffffffffff!

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