samedi 27 avril 2013

verre et bleu

Sur les ongles, c'est un bleu turquoise que je lui ai offert la dernière fois.
- Il tient très bien, dit-elle.

J'aime sa coquetterie, le soin qu'elle met toujours à sa tenue. Aujourd'hui : petit pull violet, jupe bleu marine à motifs blanc et rouge un peu années cinquante. Je me dis : ça, quand ça sera perdu, ce sera vraiment le signe de la fin.
Je prends des photos de ses mains sur sa jupe. Elle rigole comme si je préparais une blague. Je lui montre les images. Elle proteste : que l'on voit ses mains si laides, avec ces veines si marquées... J'ai envie de lui répondre que ce n'est pas grave, que cela va rester entre nous mais je crains de mentir. 
Plus tard alors j'en reprends quelques autres sous un angle et une lumière différente qui font disparaître un peu tout ce qu'elle n'aime pas voir. De mon côté ça me plaît de capter l'amorce de son cou ridé dans le cadre. Elle râle encore car on distingue les veines de sa main droite.

Elle parle beaucoup d'assiettes et de verres ce soir. Cherche à se rappeler d'où viennent ce service, ces tasses, ces plats.
- Si tu as besoin de quelque chose dis-moi, je t'en donnerais.
Elle a tendance depuis des mois à vouloir se séparer des objets. On compare deux ensembles de verres, les uns semblent plus onéreux, plus lourds que les autres.
- Tu ne les veux pas ?
- Non, vraiment. D'ailleurs, je ne les aime pas beaucoup. Je préfère les autres qui sont plus fins. Pour tout ce qui est tasse, verre, je suis comme papa, j'aime ce qui est fin...
- Comme papa ?..., reprend-elle, surprise, en souriant très largement et les yeux soudain baignés de larmes. Comme papa. Ça me fait plaisir.


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