lundi 4 juin 2012

jaune et vert

Samedi après midi je suis allé lire à la "plage", le petit square du quartier dévolu à la bronzette parisienne dès que les beaux jours sont là. La pelouse est vallonnée, en cercles concentriques, je ne sais si c'est par souci esthétique ou pour éviter qu'elle soit transformée en terrain de football.
Chaque fois que je m'y installe, je repense aux pelouses de mon enfance fichées d'un panneau de bois vert foncé sur lequel était peint en lettres blanches : "pelouse interdite". Et je mesure les mutations de la société, en l'occurrence celles de l'espace public, depuis les années Pompidou en noir et blanc.

Du jaune et du vert. Fleurs artificielles chez ma mère, séduisante
serveuse chez Habemus, lecture au Square Villemin.

J'étais en compagnie du livre Pilar que j'avais pris en photo la veille au restaurant, tant le rapport de sa couverture jaune sur le fond du mur peint de branchages bleu canard et ocre rouge m'avait séduit, et dans cette séduction il y avait de la joie, celle de la lecture et celle de constater que ce restau, s'il avait changé récemment de propriétaire, avait cependant conservé sa belle serveuse, elle aussi maîtresse en art de marier les couleurs. Cet hiver je l'avais vu accorder des collants bleu cyan (foulard assorti dans les cheveux) avec de grosses chaussettes kaki. Cette fois elle affichait un tee-shirt plus que vert et une rose jaune piquée dans sa chevelure (la photo est volontairement à contre-jour pour préserver l'anonymat de la jeune femme), toutes audaces qu'elle trimballe avec un naturel charmant.

Association d'idées, et ensuite d'images : rendant visite à ma mère il y a une dizaine de jours, je trouve sur la table de son salon un bouquet d'une laideur infinie, roses jaunes courtaudes ayant l'air d'être fichées dans un sapin de noël. Je me demande qui a bien pu lui faire présent d'une chose aussi vilaine. Elle prend mon regard effaré pour de l'admiration.
- N'est-ce pas qu'elles sont belles mes roses, jubile-t-elle. Eh bien elles sont fausses, tout le monde se laisse prendre, ajoute-t-elle avec fierté.
Le pire est d'apprendre ensuite qu'elle a acquis pour elle cette monstruosité dans une boutique mortuaire, au cimetière, où elle achetait des fleurs fraîches pour la tombe de sa propre mère.
Heureusement que le rire, la beauté et les couleurs nous sauvent...

Habemus, 13 rue de Montsigny, 75002 Paris.

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