mardi 1 octobre 2013

idées reçues

C'est au square, celui que j'évoquais dans le billet pelouse, et ce sont des mini-histoires entrevues là-bas. Il n'est plus temps d'y retourner malgré la clémence de la météo, et je vous les livre comme pour clore l'été.
D'abord il y a cette scène sans parole. Trois jeunes gens, des grands ados d'aujourd'hui avec barbes naissances et tornade capillaire sur le crâne, plutôt cinquième que dix-huitième arrondissement. Trois, mais curieusement deux seuls d'entre eux sont en grande conversation, le troisième plongé dans un livre, comme moi au moment où je les observe, trop loin pour entendre ce qui se dit. Le temps passe sans rien changer à cette configuration, l'un rivé à son bouquin, les deux autres bavards, s'esclaffant, s'animant, gigotant. Cette cohabitation dure tant que j'imagine un moment que peut-être ils ne sont pas ensemble. Je me redresse, les regarde mieux : si, ils partagent bien le même paréo posé sur le gazon. 
C'est ainsi que je remarque le format du livre qui monopolise l'attention du jeune homme : visiblement un format plus grand qu'un roman classique, une couverture qui parait rigide, cartonnée. La curiosité me fait m'extraire de mes travaux pour observer ce lecteur d'été. Il est concentré et expressif. Par moment il semble opiner du chef pour donner son consentement, parfois encore il a une mimique appuyée qui dirait "ah ben ça c'est culotté" ou bien "chapeau, c'est gonflé". Je reste longtemps l'air faussement tourné vers mon livre mais en réalité guettant le sien, espérant un mouvement, quelque chose qui me fasse entrevoir la couverture. Soudain ça y est, va se découvrir quel auteur, quel savoir nourrit cet esprit délaissant ses amis, exclusivement tourné vers le texte ? C'est un livre de cuisine : La Cuillère d'argent, spécial pâtes, chez Phaidon.

L'autre scène est au contraire toute de paroles. C'est un jeune homme, seul, en débardeur et pantalon de sport blancs, les cheveux noir corbeau et la peau pain d'épices. Il est au téléphone :
- Oui je prends le soleil, enfin, c'est pas le soleil du pays mais c'est déjà ça.
(...)
- La Turquie.
(...)
- Mais non, la Turquie, je ne suis pas arabe.
(...)
- Mais faut arrêter de tout mélanger, nous on n'est pas arabes, ça n'a rien à voir, y'a que la religion qui est pareille. Nous on est évolués, on est en voie de développement.

Ajoutée après coup, la photo de ce tee-shirt stambouliote
qui m'a toujours amusé...

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