mardi 24 janvier 2012

musique et mémoire

Je me rend chez une amie, l'autre soir, qui habite momentanément rue Charlot. Je passe, pour la rejoindre, devant la cathédrale arménienne Sainte-Croix, que j'ai déjà citée un jour où j'allais voir l'exposition du photographe Michael Wolf (billet vu! du 23/11/10) : elle est célèbre pour ses orgues, et la beauté des chants à l'office du dimanche  (j'y pense d'autant plus ce soir car la loi sur la négation du génocide arménien vient d'être adoptée, si j'en crois une dépêche du Parisien datée de moins d'une heure ; loi mémorielle qui procure autant de baume que de violence bien évidemment).
Plus loin presque arrivé à la rue des Quatre-Fils, je tombe sur la vitrine d'un Gepetto du saxo devant laquelle il est impossible de ne pas s'extasier : les instruments, à foison, avec leurs ors, et une multitude de petits personnages figés dans cette forêt muette (évidemment une fois le rideau de fer tiré, toute cette bande exulte, fanfaronne, s'agite, bastringue et festoie jusqu'à l'aube et au matin reprend, fourbue, sa fausse immobilité).

La vitrine de l'artisan Guy Collin, 6 rue Charlot, 75003 Paris

L'expression Gepetto du saxo est restrictive, l'artisan lui-même apostrophe le musicien par ces mots : "que vous soyez flûtiste, clarinettiste, saxophoniste, bassoniste, hautboïste..." Je n'y connais rien, mais ça n'a pas l'air du pipeau : on chuchote que cet orfèvre du vent fait des merveilles.
Une fois chez mon amie Yop je profite de la vue plongeante sur le bâtiment des Archives nationales que je contemplais souvent lorsque que j'allais rejoindre, il y a longtemps (plus d'une décennie tout de même) un magasin de déco vintage pour lequel je travaillais, rue de Poitou. Je n'ai jamais su qui en était l'auteur et je réclame que l'on furète de suite sur Internet. Réponse : Stanislas Fiszer, en 1988. C'est un bâtiment dont j'ai toujours aimé une forme d'humilité, à savoir un modernisme sans arrogance et une façon de s'intégrer dans un environnement hétérogène, et du coup, d'en être comme le liant.
Sculpture de Ivan Theimer. Image issue du site
www.archivesnationales.culture.gouv.fr

Après cette soirée (nous avions autre chose à faire que de papoter archi plus longtemps) je cherche de nouvelles infos sur les Archives et je tombe par hasard sur cette amusante anecdote. La sculpture en façade dont j'ignorais la signification (je la cherchais en lien avec les archives) est en rapport avec la légende des Quatre fils Aymon qui donne son nom à la rue (car une auberge à cette enseigne s'y tenait autrefois). Et je me demande si c'est pour le plaisir de la population du quartier à fort pourcentage homosexuel que le sculpteur a doté ses héros de ces étranges sous-vêtements échancrés.

4 commentaires:

  1. C'est dingue, j'ai toujours vu un agneau porté sur un piédestal ! Et je m'aperçois que c'est bien Bayard, le cheval des 4 fils Aymon, qui trône en haut ! Où sont passés les 2 autres frères ?

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    1. Oui c'est difficile de reconnaître les quatre fils d'autant que l'iconographie classique les représente habituellement tous les quatre sur Bayard. Je pense que dans cette œuvre les frères "manquants" sont les deux hommes gravés dans la pierre (et nus cette fois !) que l'on aperçoit derrière ceux qui sont en volume.

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  2. Sans être homo, je déplore que le flou de la photo ne permette d'appécier l'érotisme de l'échancrure des sous-vêtements... A l'occasion, je suis sûre que tu nous la referas plus nette.
    Et même sans ça, merci pour l'anecdote, le souvenir de cette épique légende, ainsi que la vitrine de saxos. J'ai la cousine germaine de vitrine avec un faiseur d'accordéon dans ma propre rue, et je m'attarde souvent à les contempler, si compliqués, avec toutes leurs touches (comment s'y retrouver ?)et à imaginer les débauches nocturnes de ces instruments, rideau de fer tombé, même sans être fan de l'amie Yvette...
    Claude

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    1. Oups! Ta remarque me rappelle que je n'ai pas créditée la source de cette image. En fait, si je suis responsable du flou des photos de la vitrine, je ne suis pour rien dans celui du cliché de la sculpture, je l'ai copié depuis le site des Archives et je vais le préciser de suite. Merci de ta lecture !

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