mardi 27 mars 2012

butterfly

Hier midi, je retourne dans le petit restaurant asiatique de la rue Helder dont j'ai déjà parlé ici. En chemin (en réalité juste au coin de cette rue et du boulevard Haussmann), je tombe sur un groupe de touristes asiatiques bardés de sacs de marques de luxe, mais tellement chargés, et de tant de sacs ! que j'hésite un instant à en faire une photo. 
Mais étant plutôt pressé ce jour-là je ne m'attarde pas et me rends à mon lieu de prédilection. Il est plus tôt que d'habitude, j'essaye en principe d'y être vers 14h00, 14h30 pour éviter le rush. Là, je me vois contraint de me glisser entre deux consommateurs déjà attablés (l'endroit est tout petit).
À ma gauche il y a une jeune fille qui déguste une soupe que je n'ai jamais goûté, celle aux pieds de cochon. Je ne sais comment elle réussit à saisir ces gros blocs d'os du bout de ces baguettes, le cou s'inclinant délicatement comme la tige d'une fleur vers son bol pour ensuite ronger quelques morceaux de viande ou de cartilage sur l'amas d'osselets. 
Je me fais cette réflexion : que beaucoup des femmes asiatiques que je croise ici ont une grâce végétale. Il n'empêche que je me demande également si elle ne va pas laisser échapper ce bout de pied dans la soupe, éclaboussant ainsi mon cachemire gris clair qui sort juste du pressing... 

Pour plus de dépaysement on oublie les plats présentés dans
le petit comptoir-vitrine pour choisir une des spécialités
affichées et illustrées. La soupe de bœuf, en haut à gauche
est excellente.
Entretemps est entrée une habituée dont j'ai déjà remarqué la beauté précédemment. Elle possède une forme de tonicité, de vivacité contenue, qui lui donne l'allure d'une héroïne de film d'action. Elle est cette fois accompagnée d'une femme plus âgée, européenne, qui paraît enquêter auprès d'elle sur les mœurs des acheteurs asiatiques. Je les entends peu mais je comprends que certaines personnes que j'ai prises ici pour des vendeurs des stands de marques de luxe seraient des "personal shoppers" : elles aideraient les clients à choisir leurs achats en un temps record. L'enquêtrice émet une hypothèse : les japonais sauraient mieux que les Chinois quoi acheter, ils seraient mieux informés, plus habitués à s'y retrouver entre toutes les offres. 
"Non, rétorque l'autre en secouant la tête, visiblement peu disposée à établir des hiérarchies entre nationalités : c'est juste une question de temps. Ils ont si peu de temps pour faire leurs courses entre les différentes visites qu'il faut les aider à acheter très vite."

Avec les beaux jours tout le monde s'habille différemment. Je note que ces femmes asiatiques ont toutes les bras nus, et des tenues noires qui mettent en valeur leur carnation laiteuse : oui, c'est amusant, elles ont la peau très blanche ces femmes soi-disant jaunes, plus claire que la mienne, surtout une peau parfaite qui capte joliment la lumière.
Une autre arrive qui me surprend par sa tenue vestimentaire différente justement. Jean skinny bleu, larges lunettes noires et long cheveux de jais, elle porte une forme de cape ou de mini-poncho avec, par-dessus, un foulard coloré noué autour du cou. D'une tape sonore elle claque les fesses d'une cliente qu'elle reconnaît, en riant, et va commander au comptoir. Qu'a-t-elle dit ? Sont-ce ses quelques mots ou son geste qui suscitent ces chuchotements dans son dos ? Quelques instants plus tard elle est assise de profil devant moi, remonte ses solaires en bandeau dans ses cheveux et pianote sur son Blackberry blanc. Ah, en fait, cette femme est un homme. C'est peut-être l'explication des messes basses.

Tout récemment en remplissant un formulaire électronique sur Internet, je me trouvais à devoir cocher un certain nombre de cases. Je me suis arrêté assez amusé devant le choix êtes-vous a) un homme, b) une femme, c) autre. Rimbaud aussi aurait souri.

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