vendredi 4 février 2011

la chair de l'info

J'ai le sentiment d'écrire un peu vite en ce moment, un peu baclé. C'est le décalage entre toute la production bouillonnante de mon petit cerveau et le peu que je restitue.
C'est aussi le résultat d'un tonus sur le mode "montagnes russes", fait d'excitation intellectuelle, émotionnelle et de redécouverte d'une certaine autonomie physique, tout cela s'effondrant en douceur pour des phases de fatigue atone, anesthésiante et assez imprévisible. Dans les parties dépressives de la courbe de l'énergie, l'écriture s'embourbe.

Ce matin, en voulant créer le lien vers le blog de Sylvie N. j'ai fait une erreur et c'est un site de rencontre sexuelle qui s'ouvrait à la place. Dans le genre femmes du monde, il y avait là aussi un sacré décalage.
Je me suis dit que j'avais mal décrit comment ce blog (maintenant à droite, dans les liens, rubrique Égypte) peut s'avérer nourrissant. Bien sûr j'y suis sensible car je connais la toile de fond sur laquelle il trace et glane (ah, voir cités Talaat Harb et la rue Champollion !). Mais je trouve qu'il apporte une matière qui manque aux travaux des journalistes dits professionnels. Qu'est-ce qu'est ? Peut-être la justesse, la bonne distance, le regard vrai? Il y a par exemple une charge émotionnelle indéniable à une vidéo qui montre les éclopés de Tahrir (jour 10, troisième vidéo) : elle se passe de commentaire (pas d'injonction à voir ou à comprendre). L'état du monde apparaît là, sous nos yeux, l'information prend chair. On comprend de l'intérieur, sans discours et au delà. Il y a une réponse entre la présence de S. sur cette place, et la présence de ces Égyptiens blessés à l'image, leur apparition sur la vidéo.

On pourra arguer que je suis en ce moment obsédé par l'apparaître (le dévoilement) et depuis toujours par la chair (et ses tremblements).

Citons pour conclure un extrait du portrait de Michel Butel paru dans libération (le 31/01/2011), signé Édouard Launet : un journal, cela doit être fait comme une œuvre d’art. Comme une sculpture, comme un roman. Ce n’est pas fait pour écrire «il y a eu 10 000 morts dans un tremblement de terre au Pérou» mais pour en faire ressentir les secousses.






3 commentaires:

  1. Le blog de Sylvie N. est en effet très intéressant pour les raisons citées dans le post et Michel Butel a bien sûr raison. Toutefois, le travail des journalistes en Égypte (je parle des meilleurs sur le terrain) n'est vraiment pas simple. Il n'est pas question de sortir une caméra dans les rues du Caire en ce moment.

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  2. Qui a dit que le métier de journaliste était simple ? Il est difficile au Caire, à Kaboul, à Alger… mais aussi à Rome ou à Paris. Et il est encore plus difficile quand les journalistes se contentent de rechercher sur le terrain des éléments qui confirment leurs convictions souvent simplistes. Voire néo-colonialistes.
    Malika

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  3. Merci pour ces commentaires élogieux que je découvre avec un peu de retard... Je réalise aussi avec cette affaire de lien raté, à quel point on court des risques insensés sur la toile !
    Quant à la prise de risque des journalistes "patentés" je suis d'accord avec Malika. Elle est assez faible, même en l'absence de violences physiques. La violence des propos convenus suffit.
    J'aime beaucoup votre blog, ses références (Edouard, Michel F....), sa liberté de ton et son éclectisme...
    Je vais continuer de l'explorer.

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