mardi 22 février 2011

Tintin en Tunisie

Tout le monde s'est ému, à juste titre, de l'emportement absurde, de la grossièreté et de l'agressivité de Boris Boillon, le tout jeune ambassadeur de France en Tunisie.
Rappelons qu'il remplace Pierre Ménat, 60 ans, en poste depuis 2009, qui prédisait, quelques jours avant la fuite du dirigeant, que Ben Ali allait tenir et le peuple se ressouder autour de lui. Belle cécité. Belle diplomatie.

Ce qui m'étonne dans les critiques portées à Boris Boillon, c'est qu'elles se focalisent sur ses "pétages de plomb". Plus extraordinaires encore je trouve, sont la vacuité de ses propos, ses approximations de langage, la suffisance de sa réflexion quand, précisément, il n'est pas dans l'énervement mais feint de maîtriser son dossier. Ci-dessous la retranscription de la vidéo de mosaiquefm.net que tout le monde connaît. Je retranscrit le texte jusqu'au fameux passage, celui des "trucs débiles".

Il est debout, face à quelques journalistes que l'on devine
"Heu, on est vraiment ici pour ouvrir une nouvelle page, hein, dans la relation bilatérale, dans la relation entre nos deux pays et ça implique aussi un autre style et une autre approche. Moi je suis là pour m'ouvrir à la société tunisienne, je suis là pour découvrir s'qu'on ne..., s'qu'on ap'..., s'qu'on ne connaît plus, ou s'qu'on n'a pas eu l'occasion de connaître. Je veux découvrir la société civile, je veux découvrir tout le monde politique, toutes les forces politiques..., la Tunisie et pas la Tunisie de la capitale, la Tunisie profonde, la Tunisie du terroir comme on peut dire et moi vous êtes les bienvenus si vous voulez heu, si vous voulez voyagez avec moi, ahlan w sahlan."
Traduction : je ne connais rien à la Tunisie, je maquille mon ignorance du mot "découvrir".
Sous-entendu : ça doit être magnifique pour les indigènes de voir l'homme blanc s'intéresser au plus terreux d'entre eux. Il faut qu'ils viennent filmer cela.

Nouveau plan, installé en bout d'une longue table où s'égrènent les journalistes, commençant par une phrase en arabe
"Une prière pour les martyrs de la révolution tunisienne et que nous ayant une pensée pour les familles des victimes et des martyrs, * voilà ce que je voulais vous dire, en arabe, heu, pour commencer.
Traduction : je parle arabe et je cite le mot prière.
Sous-entendu : l'indigène aime bien que l'homme blanc partage ses coutumes locales.

Nouveau plan, toujours à table
"La Tunisie est le pays des miracles. Ce qui s'est passé (il regarde ses notes, à sa gauche) relève du miracle et c'est la preuve que (il regarde ses notes) un homme libre, qu'un peuple libre peut réaliser tous les miracles. Et la Tunisie a donné au monde une leçon d'espoir. Une leçon d'espérance."
Traduction : on ne parle pas de politique.
Sous-entendu : faut pas que l'indigène ait des idées de révolution ou de gestion. Laissons lui le mot espoir à ronger.

Nouveau plan, toujours à table
"Comme vous le savez le tourisme c'est 7% du budg..., de de..., du Pib, heu, de la Tunisie, c'est 1,5 millions de touristes français par année et on veut, la France veut comme mesure concrète immédiate d'aide à la Tunisie, on veut relancer le tourisme en Tunisie. Et on le dit très fort et très haut et très clair... les Français, les Européens doivent reprendre leurs activités touristiques en Tunisie, le tourisme en Tunisie ça génère des activités dans des m..., dans des centaines de secteurs, les transports, l'artisanat, l'hôtellerie, le, et donc c'est quelque chose qui est tout à fait important. Je veux fluidifier la circulation entre nos deux pays. Il n'y a pas de coopération, il n'y a pas de véritable amitié entre les peuples sans cet échange humain."
- Question d'une journaliste qui demande si il y aura donc des allégements dans les procédures d'obtention de visas
"Non, ça veut dire que...,  c'est pas des allégements, ça veut dire qu'en fait il faut juste faire en sorte de fluidifier les choses, heu, actuellement on a un certain nombre de Tunisiens qui vont en France chaque année, eh bien il faut faire en sorte que plus de Tunisiens puissent accéder à la possibilité de se rendre en France, et en Europe, heu, de manière régulière, heu, sans susciter de, de drames, et sans, sans humiliation et sans gêner les gens."
Traduction : je n'ai rien à dire alors je parle tourisme et flux migratoire dans un flou total.
Sous-entendu : le rêve de tout indigène est de quitter son pays pourri. Les hommes blancs viennent faire du tourisme en Tunisie tandis que les indigènes se rendent illégalement en France. Faut qu'ils restent chez eux entretenir les piscines et les plages.

Mille sabords, ça insulte nos deux pays une diplomatie de ce tonneau-là.

* traduction d'après le post.fr.

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