jeudi 9 septembre 2010

la manche rouge

"Je me rappelle un soir au Matrix quand un voyageur est entré avec un gros sac à dos et a proclamé : "Quelqu'un qui veut du L...S...D... ? J'ai tout ce qu'il faut ici ; j'ai besoin que d'un endroit pour le préparer."
Le patron lui arriva dessus immédiatement en murmurant : "Calmos, calmos, viens derrière dans le bureau." Je ne le revis plus après cette nuit-là, mais avant de disparaître, le voyageur avait distribué ses échantillons; d'énormes gélules blanches. J'allais dans les toilettes hommes pour m'avaler la mienne. Mais rien qu'une moitié pour commencer, me dis-je. Bien raisonné, mais pas facile à faire dans les circonstances. J'avalai une moitié, mais laissai tomber le reste sur la manche de ma chemise Pendleton rouge... Et comme je me demandais que faire, je vis entrer un des musiciens. " Qu'est-ce qui ne va pas ? fit-il.
- Eh bien, toute cette poudre blanche sur ma manche, c'est du L. S. D."
Il ne dit rien : se contenta de m'attraper le bras et de commencer à me le sucer. Très gros, comme tableau. Je me demandai ce qui arriverait si quelque jeune type genre agent de change amateur du Kingston Trio avait le malheur de s'aventurer dans les toilettes et de nous surprendre en plein acte. Je l'emmerde, me dis-je. Avec un peu de chance sa vie sera par terre — il se dira que juste derrière la porte étroite de tous ses bars préférés, des hommes en chemises Pendleton rouge se prennent des pieds incroyables en faisant des choses qui lui échapperont toujours. Oserait-il se sucer une manche ?..."
("Las Vegas parano", Hunter S. Thompson)

Parfois quelques mots seulement m'entraînent dans un espace vaguement douloureux, un poil nostalgique, très beau, où le sentiment de ma jeunesse perdue grince un peu, et je sais que je suis victime de la poésie des images plutôt que de celle du langage.

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